Leadership africain au féminin

Il est vrai mais peu de dire que le monde est préoccupé par diverses questions étiques. Il est inéluctable de s’attarder sur la question de l’égalité des genres devant les droits et devoirs de l’un et de l’autre genre, au moment où de rarissimes pays comme l’Allemagne admettent depuis peu, l’existence d’un troisième genre. N’allons pas si vite en besogne. Parlons à notre niveau d’africains, de l’égalité des chances du féminin et du masculin, qui sont des questions qui concernent à plusieurs égards les cultures des quatre coins de la planète.

Quel Etat peut donc se soustraire de la communauté mondiale sur cette question et affirmer qu’il est arrivé à la parité parfaite ? Nous reconnaissons l’existence de réelles avancées sur cette question mais le pays sur lequel les autres pourraient prendre exemple exemplaire a hélas, lui aussi, encore des efforts à faire, tant l’histoire des inégalités des genres prend racine dans les profondeurs de la nuit des temps. Si le cas de l’Afrique est celui qui nous intéresse aujourd’hui, c’est aussi parce qu’une étude vient d’être réalisée sur l’émergence d’une nouvelle génération de leaders féminins.

En ce mois d’avril parisien où le temps est très favorable à une sortie matinale, direction le centre interallié pour un petit déjeuner débat au cercle interallié de Paris. Le temps de chaleureuses salutations, d’échanges de cartes de visites, nous nous attablons et vite, prenons connaissances de ce qui ressort de cette étude HAVAS HORIZONS qui jette un regard sur la place des femmes en Afrique. L’ambition n’est pas de réaliser une étude empirique, mais plutôt d’éclairer sur l’une des transformations les plus importantes à l’œuvre aujourd’hui : l’évolution de la place des femmes en Afrique.

Une évolution positive et encourageante

Ces dernières années, la situation de la parité semble évoluer plutôt positivement pour la majorité des personnes interrogées. Le continent serait dans la bonne direction d’après ces chiffres encourageants :

72% observent une nette amélioration de la situation ces dernières années

8% estiment que la situation n’a qu’assez peu évolué

20% ne voient aucune évolution notable

Le dernier rapport de la Banque Mondiale ‘‘Les femmes, l’entreprise et le droit’’, l’Afrique détient le record du nombre de réformes en faveur des femmes sur les 10 dernières années avec 71 textes ratifiés sur cette période, sur les deux 274 réformes menées dans les 181 pays étudiés. Ce chiffre montre la prise de conscience générale de ces enjeux par les Etats.

Au Rwanda, par exemple, l’amélioration du régime foncier, initié en 2005, a amené les femmes à accroitre leurs investissements dans les terres de 19%, soit le double des hommes sur la même période. L’épouse de l’Ambassadeur du Rwanda, madame Tessy Kayitana, était présente à la présentation des résultats de l’étude Havas Horizons-Women In Africa, Avril 2019.

Egalement, le processus engagé actuellement en Tunisie pour l’égalité femme-homme face à l’héritage doit permettre un meilleur accès à la propriété et, in fine, à l’entreprenariat. Elles ne sont que 12% aujourd’hui à posséder un bien immobilier, et seulement 18% des entreprises sont détenues par des femmes.  

Une amélioration de l’accès aux postes à responsabilités

Une très large majorité des sondés observe une véritable transformation en matière d’accès aux postes à responsabilités des femmes, et ce sur l’ensemble du contient, dans tous les secteurs, et à tous les niveaux.

79% considèrent que l’accession des femmes à des postes à responsabilités s’est améliorée

20% estiment que cette amélioration est peu perceptible

Seul 1% ne voit aucun changement

L’Union africaine a, selon cette étude Havas Horizon endossé le rôle de précurseur sur les sujets d’égalité. Dès 2003, la parité a été instaurée pour la désignation de ses commissaires. La même année, la quasi-totalité des pays africains ratifie le Protocole à la Charte des droits de l’homme et des peuples relatifs aux droits de la femme en Afrique, ou au Protocole de Maputo. En 2004, c’est la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes qui fait l’objet d’un consensus de la part de la majorité des Etats africains.

L’institution panafricaine a également fait de cette question un sujet central pour le continent en décrétant la décennie 2010-2020 comme celle de la femme africaine. Afin de soutenir les initiatives permettant une meilleure autonomisation des femmes, elle crée le Fonds dédié en 2010. Récemment, la Commission Economique pour l’Afrique et la Banque africaine de développement ont lancé elles aussi leur fond pour la promotion des femmes africaines.

L’accès des femmes à des postes de responsabilité est, selon l’étude Havas Horizons, une réalité dans de nombreux pays. Si au niveau continental les femmes ne représentent que 6% des élues, certains pays font figure d’exception. Au Mozambique ou en Afrique du Sud, 39% des députés sont des femmes. Au niveau local, les villes de Kigali, Tunis et de Dakar ont élues des Femmes à leur tête.

En Ethiopie, deuxième puissance démographique, du continent, la nomination d’une femme à la présidence par un parlement lui-même composé à 37% de femmes, est un symbole fort de la transformation du continent et un véritable message envoyé au reste du monde.

 

 

Les facteurs clés à l’origine du succès

L’émergence de ces femmes leaders semble pour l’étude, s’appuyer sur des facteurs clés de succès selon nos répondants.

La capacité à se constituer un réseau est primordial pour 73% des répondants

La capacité de résilience est un trait commun pour 73% des sondés

La formation et l’éducation sont un pilier du succès de ces leaders féminins (70%)

Afin de réaliser les ambitions de l’Agenda 2063 et les Objectifs de Développement Durable 2030, l’Union Africaine et l’ONU lancent en 2017 le ‘‘Forum de haut niveau sur les femmes leaders pour la transformation de l’Afrique’’. L’un des résultats de cette manifestation a été la création d’un réseau de femmes africaines dirigeantes qui a vocation à permettre une meilleure coordination des actions en faveur de leur émergence et de leur réussite.

La constitution de réseaux féminins est aujourd’hui l’un des leviers sur lequel cette nouvelle génération s’appuie. Parmi ces réseaux, certains sont le signe d’une amélioration de l’accès à une meilleure formation, une meilleure éducation. Créé au début des années 2000 le Harvard Alumnii for Africa compte aujourd’hui plus de trois mille membres africains. Il ya de plus en plus de jeunes africaines, parmi les anciens de l’une des Universités les plus prestigieuses au monde.

Cette nouvelle génération de femmes leaders peut compter sur le soutien de toutes et tous et ainsi continuer à faire valoir leur droit.

96% des répondants estiment que cette émergence a vocation à s’accélérer

99% souhaite participer davantage à cette émergence

‘‘L’égalité entre les femmes et les hommes est bien plus qu’un objectif en soi. Il est la condition nécessaire pour nous permettre de relever les défis de la réduction de la pauvreté, de la promotion d’un développement plus responsable, et plus durable, mais aussi dans l’accomplissement de notre volonté de construire ensemble des sociétés plus inclusives avec des modèles de gouvernance plus équilibrés’’. Cette déclaration de Koffi Annan est aujourd’hui plus que jamais d’actualité. Celles et ceux qui ont pris le temps de répondre à cette étude semblent d’ailleurs en phase avec cette vision de l’ancien Secrétaire général des Nations Unies.

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